Le 27 rue de Seine (et 28 rue Mazarine)

D’après les recherches menées dans le cadre de la Protection Patrimoniale, le 27 rue de Seine est une grande maison ancienne du XVIIe siècle qui fut remaniée au XVIIIe. Dans la cour, un escalier à vis hors d’oeuvre construit  dans une tourelle est un vestige  rare de constructions du XVIe siècle. La construction du 28 rue Mazarine date aussi du XVIIe siècle, même si la maison a été remaniée et abrita les deux célèbres frères Champollion.

Au temps de Gilles Le Maistre

En 1540, le terrain sur lequel se trouve les deux immeubles faisait partie d’une grande parcelle de plus de 5 arpents située entre les fossés de la Ville (maintenant rue Mazarine) et la rue de Seine.  Son propriétaire était Gilles Le Maistre, futur premier président au Parlement de Paris. Voulant faire une bonne affaire, il partagea cette terre en bandes parallèles à la Seine et le 3 août 1543, vendit un de ses lots de 6 toises de large sur 22 toises de long1 qui s’étendait « le long des fossés de la ville du côté de Nesle jusqu’à la rue de Seine ».  L’acte2 mentionnait, comme se plaisait toujours à le faire Gilles Le Maistre, que la pièce de terre était « à l’opposite du chasteau du Louvre, la rivière entre deux ». La vente était faite à un certain Jean Duchesne moyennant 6 livres 12 deniers de rente foncière et perpétuelle à verser en quatre fois par an. L’acheteur s’engageait en outre à payer chaque année le cens à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés qui était au prix de 10 sols tournois par arpent et à construire sur son terrain une maison manable, c’est-à-dire habitable.

1543-1572 . Les Duchesne

Jean Duchesne fit construire une maison et y mit pour enseigne Les deux clefs enchaînées, ce qui n’était point surprenant étant  donné le métier qu’il exerçait. Il eut au moins deux fils prénommés Jean l’aîné et Jean le jeune et deux filles, l’une qui répondait au doux prénom d’Espérance et l’autre qui s’appelait plus classiquement Marguerite. 

En 1551, il maria sa fille Marguerite à un maître menuisier et donna aux futurs époux en faveur du mariage la somme de 120 livres tournois en deniers comptants avec un lit de plume garni de traversin valant 3 écus soleil, 2 robes, 2 coiffes, 2 chaperons et une demie douzaine de draps de lit pour 120L3.

En 1572, Jean Duchesne le père était décédé. Espérance Duchesne et son mari Gilles Byot, maître serrurier, vendirent le quart qui leur appartenait dans la maison à une certaine Germaine Maupoinct, veuve d’Etienne Saulcier, vivant conseiller au Parlement4. Quelques mois après celle-ci revendit ce quart à son gendre Benigne Le Ragois.

En 1572, Jean Duchesne le père était mort. Sa fille Espérance et son mari vendirent le quart par indivis qu’ils possédaient en la maison5. Ses deux frères Jean l’Aîné et Jean Le Jeune en firent de même le 10 mai de la même année roi6. Enfin, une certaine Marguerite Duchesne, épouse de Jacques de Garanflot vendit directement à Bénigne Le Ragois son quart7.

1572-1573. Germaine Maupoinct

Germaine Maupoinct, l’acheteuse de la femme Biot, était veuve d’Étienne Saulcier, en son vivant conseiller au Parlement. Le bien contenait la maison, une cour et un jardin qui s’étendaient toujours entre les rues de Seine et Mazarine et avaient pour lors comme voisins à gauche en regardant la maison, Jean Fournier et à droite M. Le Quay, valet de chambre du roi.  En échange, Germaine Maupoinct versait aux vendeurs une rente de 91 livres 13 sols 4 deniers. Elle ne garda cette maison qu’une petite année comme on va le voir …

1573- 1650 . La famille Le Ragois

Le 21 janvier 1573, par devant les notaires Charpentier et Cadier, Germaine Maupoinct lors veuve d’Etienne Saulcier, fit un échange avec son gendre, Bénigne Le Ragois en lui cédant son quart de la maison, cour et jardin. C’est ainsi que Bénigne Le Ragois devint propriétaire à part entière des 27 rue de Seine et 28 rue Mazarine : deux quarts vendus par les fils Duchesne, un quart vendu par Germaine Maupoinct et un quart cédé par une fille de Duchesne

Bénigne Le Ragois était notaire et secrétaire du roi Henri III. Il avait épousé en 1567 Marie Saulcier dont il eut de nombreux enfants dont certains furent très célèbres : Séraphin qui fut seigneur de Guignonville, intendant des Guise et par la suite trésorier de la duchesse d’Orléans, Claude qui fut seigneur de Bretonvilliers, secrétaire du conseil du roi et qui avait un cabinet de curiosités célèbre, c’est lui qui donna son nom à une rue de l’île Saint-Louis à cause du très bel hôtel particulier qu’il y fit construire.  Bénigne II qui était conseiller du roi et payeur des rentes de l’Hôtel de Ville, Philippe (une fille) qui épousa François Peyrat, conseiller et trésorier général de la maison et finances de monseigneur le duc de Montpensier, (voir l’histoire de l’immeuble du 51 rue de Seine) et enfin Jeanne qui fut marié à Jacques Baret, avocat au Parlement.

Marie Saulcier décéda en 1630

En 1647, Le 4 mai 1652, Antoine Peyrat vend la maison qui s’étendait encore de la rue de Seine à la rue Mazarine à Henri Oudinet, bourgeois de Paris. On entrait alors dans la maison par une belle porte cochère. On arrivait alors dans une cour et en traversant la maison on pouvait admirer un jardin. La maison aboutissait alors à la rue Mazarine .

1650- 1690 . Le sieur Oudinet

En 1678, une déclaration de cens à l’abbaye de Saint Germain des Prés nous apprend que c’était toujours le sieur Oudinet qui la possédait. Cependant depuis une date indéterminée et pour une raison tout aussi inconnue la maison appartint en 1700 au sieur Charles  Pinon qui vendit la partie sur la rue Mazarine à un certain Hiérome Leroux, seigneur de Longueloise par un acte passé devant Me Moufle le 3 février 1700.

1???-1750. La famille Pinon

Puis ce fut Anne Pinon, chevalier, seigneur de Quincy, Avors et autres lieux, qui devint propriétaire pour moitié, l’autre moitié appartenant à sa soeur Jeanne Pinon qui avait pour époux le sieur Michel Vialard, seigneur de Herse et autres lieux. A sa mort Anne Pinon laissait deux héritiers : Anne Louis Pinon et Louis Paul Pinon. Un partage des biens de la succession fut fait devant Me Delaleu le 25 octobre 1722 qui attribua la moitié de la maison à Louis Paul Pinon. A la mort de sa tante , la veuve Vialard, l’autre moitié revint à Louis Paul grâce à un partage qui eut lieu le 29 aout 1729 devant Me Marchand.

Hélas Louis Paul Pinon malgré ses seigneuries de Bois Bouzon et autres lieux, malgré sa position de maître des Requêtes et de conseiller du Roi accumula les dettes avec sa femme Marie Claude Pinson. Les créanciers se réunirent et demandèrent la vente des biens du sieur Pinon d’Avors, ce qui fut fait par Me Duval le 7 juillet 17508 .

L’intéressé avaient plusieurs maisons à Paris dont l’une était située rue de Seine à l’enseigne des Deux Daims qui fut vendue au profit du sieur Gaspard Peyry, perruquier de son état et de sa femme Catherine Chabert.

La maison était composée de deux corps de logis. Celui sur la rue avait deux boutiques dont l’une par abritait un marchand de tabac, et l’autre par un vitrier. Deux étages et un grenier étaient au-dessus du rez-de-chaussée. Le corps de logis de derrière avait trois étages de chambres et une cave; une remise était à gauche dans la cour.

 1750- 1920 . La famille Peyry et ses descendants

Les acheteurs étaient donc Gabriel Peyry, maître perruquier-baigneur et sa femme Catherine Chabert. Ils avaient emporté les enchères  pour la somme de 24 250 livres ce qui fut une bonne affaire puisque la maison fut estimée 60 000 livres  en 1777, après leur décès. Ils avaient eu deux enfants :

– Catherine Charlotte qui avait épousé un perruquier du nom François Louis Thomas Méan  déjà décédé en 1777 laissant trois enfants : Thomas, Marie-Louise et ???

– Marie Geneviève, épouse de Jean Frédéric Eckart, baigneur, qui eut à son tour de nombreux enfants, deux filles mariées à des marchands de soie, un fils prêtre et un autre perruquier.

Une sentence de licitation qui fut prononcée le 26 août 17789 adjugea la maison à la veuve Méan


  1. Environ 12 m de large sur 43 m de profondeur 

  2. A.N. ; M.C. ; XXXIII/290, vente par Gilles Le Maistre à Jean Duchesne du 3 août 1543 

  3. A.N. ; M.C. ; LXXIII/44, contrat de mariage de Marguerite Duchesne et Pierre Chevignier du 23 janvier 1551 (n.s.)  

  4. A.N. ; M.C. ; CXXII/1209, échange entre Gilles Byot et Espérance Duchesne sa femme  et la veuve Maupoinct du 1er avril 1572 

  5. A.N. ; M.C. ; CXXII/1209, échange entre Gilles Byot et Espérance Duchesne sa femme  et la veuve Maupoinct du 1er avril 1572 

  6. A.N. ; M.C. ; CXXII/40, échange entre les sieurs Duchesne et le sieur Le Ragois du 10 mai 1572 

  7. Selon l’inventaire après décès de Marie Saulcier, la transaction eut lieu devant les notaires Lamiral et Nutrat (qui n’exerçait pas à cette époque !) le 11 décembre 1572 

  8. A.N. ; M.C. ; LXXXVII/1000, vente du 17/07/1750 

  9. A.N. ; Y 2901 

Ce contenu a été publié dans Le 27. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *